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Didier K. Expérience
7 décembre 2020

Paristanbul - E.2/6

ist

A la sortie de l’aéroport, nous avons pris un taxi jaune en direction de Sultanahmet. Le chauffeur nous fixa un prix (moins de 15€ pour deux) et s’y tiendra malgré la densité de la circulation. Ce qui m’a le plus surpris, c’est la courtoisie générale des gens. Les touristes dans leur ville sont très bien reçus, et par tout le monde. Les gens sont ravis d’engager la conversation, de vous toucher, de vous serrer la main, de vous rendre service juste l’espace de quelques minutes. Bien évidemment, je ne parle pas des sites touristiques où la méfiance est de rigueur comme sur n’importe quel site dans le monde. Aucun taxi n’a essayé de m’arnaquer, aucune note de restaurant à recompter, aucun risque de se faire agresser. Sécurité maximum.

N’ayant pas mis les pieds en boite de nuit, je ne pourrai pas en parler, cependant, des avertissements sont affichés à l’entrée des hôtels à l’attention des voyageurs « males » sur les risques de se faire entièrement dépouiller par les amis des « hot Turkish girls » rencontrées à l’intérieur. Des pièges à touristes, quoi !

Istanbul était déjà pour moi, une ville fascinante bien avant ma venue. Elle l’est devenue davantage, maintenant. Cette destination n’était pas anodine : c’est la ville d’où venait mon grand-père, qui l’avait quitté en 1922, les mains dans les poches, sans argent, sans rien. Le quartier de Sultanahmet ne fut pas un hasard non plus : c’est là où vécu ma famille pendant la Première guerre mondiale et les heures tragiques du génocide, auquel ils échappèrent comme par miracle. Je dis « par miracle », car je ne sais pas ce qui leur a permis de rester en vie… C’est aussi l’endroit où se situe le patriarcat arménien de la ville. En somme, j’avais mille raisons d’être là.

Cependant, je n’avais ni adresse, ni connaissance qui put m’indiquer le lieu exact où ils avaient habité. Je ne savais rien mais ce n’était pas très grave. Etre à Istanbul était déjà beaucoup. Cette ville qu’on appelle « Bolis » dans ma famille, abréviation de Constantinopolis (ou Constantinople) en arménien.

C’est la seule ville au monde qui soit à cheval sur deux continents, comme un trait d’union entre deux mondes, je me suis senti tout de suite chez moi… Du quartier de Sultanahmet, qui a gardé un certain charme constantinopolitain, avec ses vieilles maisons ottomanes en bois, aux collines abruptes de Beyoglu sur la rive asiatique avec ses bars branchés et son architecture anglo-saxonne, ou Chichli avec ses boutiques chics et ses immeubles haussmanniens. On se croirait presque à Paris tant le dépaysement n’est pas toujours sensible… Comme j’aime Paris, Istanbul m’a plu par son cosmopolitisme, sa grandeur, son histoire, sa mixité, ses odeurs… Sorti des quartiers touristiques et des quartiers animés comme Beyoglu et Taksim qui forment le centre, séparés par le Bosphore et la Corne d’Or, on est vite confronté à la pauvreté. Ici, il n’est pas rare de voir des jeunes adolescents travailler ou des enfants faire la manche. Le long de la ligne de tramway s’étendent des kilomètres d’immeubles misérables jusqu’au Parc des Expositions flambant neuf.

La vraie différence, ce sont les mosquées. Que ce soit la Mosquée Bleue, la Mosquée Neuve, la Mosquée de Soliman, ou la petite mosquée de quartier ; difficile de ne pas les remarquer. Cela s’entend aussi du lever au coucher du soleil, cinq fois par jour. Si vous n’êtes pas sensible au chant du muezzin, l’appel à la prière peut être un vrai supplice, surtout la nuit. De toute façon, personne ne s’attend à voir la ville couverte d’églises. Vivre entre la Mosquée Bleue et Sainte Sophie, a quelque chose de magique, d’inoubliable.

On se déplace facilement à pied, c’est un bonheur de marcher dans les rues bondées, le long des murs de Topkapi jusqu’à la gare ferroviaire de Sirkeci, entre places et marchés, terrasses de cafés et mosquées… Le tramway et une seule ligne de métro, assez modernes, permettent de voyager sans problème et facilement, dans le plus grand confort, de la rive européenne vers la rive asiatique. Des ferries relient les différentes parties de la ville aux douze millions d’habitants, jusqu’aux rives de la mer noire.

De la rive européenne d’Eminönu aux deux rives asiatiques de Karaköy et de Kadiköy, on a l’impression d’avoir trois Lisbonne devant soi. C’est impressionnant le jour, c’est fantastique la nuit.

Ce qui frappe d’emblée, c’est la puissance économique que la ville étale à vos pieds. Un aéroport aussi moderne que ceux d’Europe occidentale, des transports en commun fiables et récents – mis à part le train un peu vieillot – tout fonctionne très bien et pour un prix raisonnable. Une circulation dense, un port encombré de navires de luxe, de bateaux de plaisance et de ferries. De nombreuses galeries marchandes, des moles, des restaurants Mc Donald’s, des bars branchés, des restaurant de kebabs… des tours de verre. Sans oublier, le formidable attrait touristique, qui est une rente quasi inépuisable… Malheureusement, ce n’est qu’une vue superficielle des choses. Les changements à réaliser sont tellement importants que je ne vois pas comment ce pays pourrait tenir les critères d’adhésion à l’UE… Et pourtant, ils l’espèrent depuis 1963.

 

Didier Kalionian  - Le Blog Imaginaire (C) 2019 - 2020

La version originale de ce texte a été publié sur le site de Yevrobatsi.org en juin 2007.

(Si cette histoire vous a plu, n’oubliez pas de liker. Merci. Retrouvez la communauté des lecteurs sur Facebook, DKalionian BlogImaginaire)

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